Un soir de semaine comme beaucoup d’autres, l’heure du repas qui approche et une petite tribu qui ne va pas tarder à déferler dans la cuisine au son d’un « on mange quoi ? » ou d’un lancinant « j’ai faiiiiiim ». Sentant le piège se refermer je n’ai plus d’autre alternative que de commettre LE crime : je sors des cordons bleus du réfrigérateur ! Un geste anodin me direz-vous, presque ordinaire, mais pourtant prémédité car l’arme a été sciemment achetée avant et en GD de surcroit !

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Exhausteur de dégoût ?

Bon voilà pour la scène du crime, en revanche j’ai des circonstances atténuantes (enfin je le croyais au moment d’ouvrir le paquet) puisqu’il avait été consciencieusement choisi pour sa composition dépouillée de plein de choses pas bonnes et notamment les exhausteurs de goût. Mais en fait là c’est la double peine ! Passé à la poêle et servi dans une assiette, il n’a pas l’air plus mauvais qu’un autre, jusqu’à la première bouchée… et une constatation sans ambiguité : ils ne lui ont pas enlevé que les exhausteurs de goût, ils lui ont aussi enlevé le goût !

Le temps de reprendre mes esprits et je constate à travers ce cordon bleu la dérive de ces 30 dernières années de notre industrie agro-alimentaire. Car en fait ce n’est pas qu’on lui a enlevé le goût, c’est surtout qu’il n’en a pas. Et comment pourrait-il en avoir ? Lui qui n’est qu’un assemblage d’éléments sans saveur : un fromage fondu pasteurisé sans âme, une tranche de jambon sans vie (ni avant, ni après) et une chapelure dont je n’ose imaginer la fabrication.

Et nous y voilà, 30 années à nous produire de la merde pas chère, 30 ans à nous coller des couches et des couches de marketing, 30 ans à développer en labo des goûts sur-mesure car la matière première n’en a plus. Mais les temps changent et aujourd’hui la mode est à la suppression des artifices, les gens veulent manger naturel, sans OGM, sans conservateurs. Alors notre bonne vieille industrie agro-alimentaire s’exécute puisque le marché le demande, dévoilant par la même une pathétique réalité : c’est définitivement dégueulasse !

Il en va du vin comme des cordons bleus ?

Quel rapport avec le vin me direz-vous ! Et bien c’est exactement la même chose, car comme pour le cordon bleu, notre chère industrie agro-alimentaire a réclamé des vins pas chers. Alors la grande majorité des viticulteurs s’est mise à produire des raisins sans âmes, à grands coup de produits phyto pour être certains que la merde soit produite en grande quantité, les oenologues ont donné des goûts aux vins à grand renfort de thermo machin, de levures trucmuches ou d’enzymage bidule. A la fin vous avez un cordon bleu… mais en bouteille !

Mais ce n’est pas fini puisque qu’aujourd’hui le marché veut des vins bios et même des vins sans soufre ! Alors ils vont le faire, je ne veux même pas savoir comment, mais ils vont y arriver… d’ailleurs ils y arrivent déjà ! Mais ne vous y trompez pas car à la fin la bouteille pleine de vin, sera vide de sens, comme tout le reste.

Moi je préfère les « exauceurs » de goût !

Car au final, faire de jolis vins, de jolis fromages, de jolies charcuteries… de jolis cordons bleus, ce n’est pas compliqué (façon de parler hein !). Il faut avoir une belle matière première et une réelle volonté de faire un beau produit. Il existe partout en France et ailleurs, des hommes et des femmes qui font le travail comme on dit, avec patience, conviction et envie. A nous de les trouver, de les aider, pour qu’il continuent de nous régaler… mais toujours sans exhausteurs de goût !