S’il est bien un vin qui symbolise l’engagement des artisans-vignerons dans leur recherche de naturel, de l’expression pure et sans artifice du vin, c’est bien le Pétillant Naturel. Mais à quel prix ! Entre prise de risque et gestion des aléas… c’est pas gagné d’avance.
Alors quand un de mes vignerons préférés me glisse au téléphone : « Tiens j’ai une idée d’article pour ton blog, on vient de s’taper 3 000 quilles de Pét’ à manipuler pour casser le tartre qui s’est formé dedans ! Dis leur comme c’est pas facile tous les jours de faire du Pét’Nat’ ! ». Ok j’y vais !

Rappel des faits n°1 : un pétillant naturel c’est pas compliqué !

Un Pét’Nat est élaboré selon une méthode dite « Ancestrale », utilisée il y a bien longtemps, puis un peu oubliée. Cette méthode consiste à n’élaborer le vin qu’avec la seule fermentation alcoolique :
1 – les raisins sont pressés et le jus commence à fermenter en cuve ou en barrique
2 – arrivée à une certaine quantité de sucres résiduels la fermentation est stoppée par le froid (souvent au coeur de l’hiver on met tout ça dehors !)
3 – au printemps le jus est mis en bouteille où il reprend et termine sa fermentation.
Du coup un vrai et bon Pét’Nat’ c’est juste des levures indigènes, des sucres naturels du raisin et du gaz… c’est simple non ?

Rappel des faits n°2 : un pétillant naturel en fait si, c’est compliqué !

Bein oui faut reconnaitre que faire une Méthode Traditionnelle ce serait quand même plus simple que de faire un Pétillant Naturel, parce que là :
– faut prendre des risques à la vigne pour aller chercher de la maturité et pas récolter à 10° potentiel
– faut sortir les cagettes pour préserver le fruit… c’est mieux pour que tout soit clean
– faut avoir des levures indigènes qui tiennent la route parce qu’on sort pas les petits sachets qui vont bien
– faut surveiller ses fermentations comme le lait sur le feu, parce que si on se fait déborder ça risque de pas pétiller dans la bouteille
– faut caler sa mise en bouteille au bon moment
– faut que ça reparte une fois dans la bouteille
Bref c’est pas facile tous les jours de travailler naturellement… avec le moins d’intervention possible !

Rappel des faits n°3 : autopsie de l’aléas du-dit vigneron (soucis assez généralisé cette année)!

On vient de voir qu’à la base la méthode est pas des plus évidentes et en plus, parfois, y a des petits aléas. Ici notre vigneron un peu agacé a vu apparaitre dans ses bouteilles de 2011 une formation de tartre (j’ai pas de photos mais je vous assure que c’est très joli à voir).
Pour mieux comprendre revoyons l’action au ralenti :
1 – En 2011 les fermentations ont été très rapides, le bon niveau de sucres résiduels a été atteint plus tôt que d’habitude
2 – Le froid lui est arrivé plus tard que d’habitude
3 – Le tirage des vins (leur mise en bouteille) est donc arrivé plus tôt que d’habitude
4 – Le froids est enfin arrivé, le vins était déjà en bouteille, le tartre précipite avec le froid… le tartre a précipité dans la bouteille !

Rappel des faits n°4 : ça se boit pas le tartre ?

Et oui vous l’aurez compris… le tartre c’est pas bon. Du coup faut l’enlever et pour ça faut le casser. Et pour le casser il faut prendre les bouteilles une par une et les taper, les secouer, les poigneter, enfin faut surtout se faire un peu ch..r !

Moralité

Finalement le Pét’Nat’ c’est pour l’amour du risque ? Pour ma part je pense que c’est plus pour l’amour du pif ! Alors quand vous picolerez gentiment votre Pét’Nat’ 2011, les doigts de pieds en éventail, pensez bien que pour que vous puissiez lever le coude, certains se sont fait les bras.

Quelques Pétillants Naturels pour la route…

Domaine Lise et Bertrand Jousset : Bubulle – Montouis sur Loire
Domaine La Grange Tiphaine : Nouveau Nez – Montlouis sur Loire
Domaine La Grange Tiphaine : Rosa, Rosé, Rosam- Vin de France
Domaine Bruno Dubois : Bulles de BD – Vin de France